Maison mégapole: Architectures, philosophies en oeuvre
Maison – MégapoleArchitectures, philosophies en œuvre
Chris Younès
Sous la direction de Chris Younès. Textes de Charre, Dollé, Gerosa, Girard, Goetz, Guéry, Maldiney, Mangematin, Paquot, Portzamparc, Rivkin, Sautereau, Tsiomis, Vallier, Younès.
18 €ISBN : 2-9[zasłonięte]06229-6Épuisé
Résumé
Quoi de commun entre maison et mégapole ? L’étendue et la durée de l’existence humaine. Nous habitons dedans et dehors, la maison et la mégapole, des territoires à échelles dilatées, distendues entre familier et forme d’inconnu. Au-delà d’une analogie inopérante ou d’une opposition superficielle, c’est notre présence à nous-mêmes et à autrui qui est en jeu dans ces deux pôles : domestique et public, microcosme et macrocosme, enracinement et mobilité. La question ne se pose pas en terme de choix, maison ou mégapole, mais comme horizons conjoints. La maison est ancrage au monde, lieu de l’intériorité, du privé, du fini infini. Bachelard et Patocka en ont fait l’archétype de l’habiter originaire en ce qu’elle abrite la rêverie et ouvre à l’intimité. L’insistance de l’homme à rechercher une demeure, un « chez soi », est confrontée, à l’heure de l’urbanisation planétaire, à de nouvelles territorialités. La mégapole, avec l’accélération et la superposition des déplacements et des communications, a déployé vertigineusement le dehors dans des espaces urbanisés proliférants sans centre ni périphérie : réseaux, virtualité, cyberespace, nomadisme multiplient les occasions de rencontres instantanées dans l’espace d’un tohu-bohu éclaté, dilué, dématérialisé, amorphe.
Extraits de presse
Urbanisme par Antoine Brès La philosophie est-elle en forme, l’architecture est-elle en pensée ? Quelles sont les relations réciproques entre penser la société des hommes et faire la ville qui les accueille, le concept philosophique et le projet architectural et urbain ? À quoi pense l’architecte et comment le philosophe se figura-t-il le monde ? L’architecture est-elle condamnée au silence et à l’espace « indicible » de Le Corbusier, même si elle peut parfois atteindre à une certaine musicalité ? La philosophie est-elle condamnée à la parole et au temps à l’intérieur duquel elle ne peut que se déployer, même si elle s’organise parfois en figure, ou peut-elle être « appliquée » à la ville comme nous y encourage Thierry Paquot, à la suite de Henri Lefebvre ? Ces questions résument, si cela est possible, « la ronde incestueuse des images et des mots » (Jean-Pierre Vallier), à laquelle nous convient les différentes contributions réunies dans ce livre dont le titre et la fragmentation en deux thèmes ne rendent pas vraiment compte. On y trouve beaucoup de mots sans aucun doute mais peut-être trop peu d’images, ou pour le moins, de figures de l’urbain contemporain (en dehors du « plissé » deleuzien quelquefois évoqué). La philosophie y est représentée dans toute sa diversité, tout à la fois ouverte et conquérante : philosophie de l’art (P.-G. Gerosa), philosophie de la connaissance (Alain Charre) ou de la politique (J.-P. Dollé)… Et, en vis-à-vis, on ne trouve qu’une architecture, seule et unique malgré le « s » du titre, tout à la fois globalisante et retranchée dans sa forteresse bâtie, avec la prétention toujours vivace de reconstruire le monde depuis la maison jusqu’à la mégalopole. Cet ouvrage a le mérite d’esquisser des passerelles salutaires (pour l’architecture) dans le prolongement des dialogues encore récents qu’ont entretenus architecture et philosophie grâce à Christian De Portzamparc et J.-P. Dollé ou Jacques Derrida et Bernard Tschumi. Et l’on peut regretter le fait que d’autres compétences sur l’espace de la mégapole, urbanistes justement, ne soient pas convoquées à cette réflexion. Les contributions les plus décisives abordent les changements que les situations urbaines contemporaines ont apportés dans les modalités d’appropriation spatiale, d’enracinement. En effet, après que les modes de transport et de communication ont affranchi le citadin des contraintes de la proximité, ou plutôt de la contiguité, qu’attend-il encore de l’espace ? A-t-il encore un « désir de ville », pour reprendre l’expression de J.-P. Dollé ? « Quel sens donner à son espace alors que sa sphère urbaine s’est élargie à l’espace non local ? » s’interroge P.-G. Gerosa. Ainsi cet affranchissement de la localité contrainte pose désormais de façon abrupte la question du rôle de l’espace dans la constitution de « l’habiter » du citadin d’aujourd’hui, de son « être au monde » contemporain. Qu’est-ce qui est encore de l’ordre de l’espace, qu’est-ce qui ne l’est pas (ou plus) ? Peut-on annoncer avec les personnages de J.-L. Godard, cité par Bruno Goetz, que « l’espace se meurt » ? La proximité qui n’est plus vitale semble se réduire de plus en plus à un rôle symbolique et à la seule représentation. Si cela s’avère exacte, n’y-a-t-il pas retournement des catégories classiques, et leur abandon (enfin) définitif, qui postulaient l’intériorité de la pensée et l’extériorité de l’espace, alors qu’aujourd’hui « la pensée se déploie et circule dans l’espace réticulaire des réseaux de communication, tandis que l’espace s’intériorise et s’individualise dans les représentations ».On ne pense jamais « nulle part », nous rappelle opportunément Benoît Goetz ; le sujet et l’espace empiriques, la société et la ville sont irrémédiablement couplés et n’émergent qu’en vertu de leur interaction. Toutes ces questions, comme on le voit, interrogent directement les praticiens pour qui la ville représente le moyen par excellence par lequel le sujet, la société, s’installent dans le monde. Elles devraient les stimuler dans leur effort à ménager les espaces et les temps, à l’intérieur desquels « l’homme doit avoir brusquement la surprise d’être ». C’est le défi que leur propose Henri Maldiney dans l’entretien qu’il accorde à Chris Younès, à l’origine de cet ouvrage.
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